
Jules-Amédée Barbey d’Aurevilly naît le 2 novembre 1808 à Saint-Sauveur-le-Vicomte, en Normandie, chez son grand-oncle et parrain, le chevalier Lefebvre de Montressel. Le grand-père paternel de Jules avait acquis un demi-siècle plus tôt une charge anoblissante d’avocat au baillage de Valognes. Jules grandit dans une famille aisée, mais très royaliste et janséniste ; il dira plus tard : « Une éducation compressive avait pesé sur moi sans me briser. » Sa famille l’influencera grandement : les exploits plus ou moins inventés de son parrain lors de la Chouannerie, racontés par sa grand-mère au coin du feu, impressionnent le jeune garçon. Il aura trois frères : Léon, né en 1809, Édouard et Ernest nés l’année suivante.
L’année des huit ans de Jules-Amédée, son père et son oncle, tentent de lui obtenir en vain une place dans une école militaire. De 1818 à 1825, après avoir passé son enfance entre Saint-Sauveur et Valognes, Barbey poursuit ses études au collège de Valognes, logeant chez son oncle, le docteur Pontas-Duméril. Son influence fut telle qu’il inspirera le docteur Torty, « un de ces esprits hardis et vigoureux », de l’une des Diaboliques. Libéral, athée, il l’aidera à se libérer de l’influence de ses parents, et lui fera découvrir tout ce que cache la société valognaise. En 1823, Barbey dédie à Casimir Delavigne sa première œuvre, un poème : « Aux héros des Thermopyles. » Quatre ans plus tard, il vient achever ses études à Paris, au collège Stanislas, et obtient le titre de bachelier au bout de deux ans. Il retourne alors à Saint-Sauveur et se dispute avec sa famille. Il souhaite faire une carrière militaire, contre l’avis de son père, puis cède et part suivre des études de droit à Caen. À la même époque, son oncle meurt ; Jules refuse pendant quelque temps de reprendre la particule, par conviction républicaine, mais finira par accoler à son patronyme le nom « d’Aurevilly » en 1836.
Pendant les deux années qui suivent, il entretient une liaison malheureuse avec Louise Cantru des Costils, la femme de son cousin germain et il rencontre Guillaume-Stanislas Trébutien, libraire à Caen, avec qui il noue rapidement une très grande amitié. Il écrit ensuite sa première nouvelle, Le Cachet d’Onyx, dont il reprendra le dénouement dans la nouvelle À un dîner d’athées.
En 1832, il écrit Léa et fonde avec Trébutien et Edelestand La Revue de Caen, revue libérale, qui disparaît aussitôt.
L’année d’après, il s’installe à Paris mais retourne souvent en Normandie. Il dilapide la fortune que lui a léguée son parrain et commence à collaborer à de nombreux journaux. Il écrit La Bague d’Annibal et L’Amour impossible dans la même période. En 1837, il se brouille avec Trébutien, mais cette brouille s’achève en 1841.
Menant une vie de dandy depuis plusieurs années, il publie en 1845 un essai, Du dandysme et de George Brummell. Dans cet ouvrage il théorise la mode du dandysme qui voit le jour au milieu du XIXe siècle à Paris et dont Baudelaire et lui en sont les représentants les plus connus. Anti-bourgeois et anticapitaliste, le dandysme est une véritable posture sociale. Les dandys aiment le caractère artificiel de l’image et vouent un véritable culte au paraître. Ils jouent avec les possibilités de tromperies et de mystifications qu’offrent les accessoires et les vêtements. En parallèle de cette vie de dandy, il lit Joseph de Maistre, qui l’influence beaucoup. En 1846, la fondation de la Société catholique avec un groupe d’amis qu’il a rencontrés chez Mme de Maistre précipite le retour de Barbey, las de ses excès, aux opinions politiques et religieuses de sa jeunesse. Il se convertit alors « intellectuellement » au catholicisme mais ne pratique pas.
La Révolution de 1848 le déçoit et le pousse dans l’opposition. En 1852, il soutient Louis-Napoléon en publiant une campagne pour le rétablissement de l’Empire. En 1849, il achève son roman Une vieille maîtresse et conçoit un grand ensemble de romans chouans et normands qu’il regroupe sous le titre d’Ouest.
En 1851, la publication presque simultanée d’Une vieille maîtresse et des Prophètes du passé étonne et fait réagir, de manière négative pour le premier mais de façon positive pour le second. Il rencontre cette même année, « l’Ange blanc », la pieuse baronne de Bouglon, avec laquelle il projette de s’unir, mais leur mariage n’aura jamais lieu. En 1854, il publie L’Ensorcelée. La même année, il recueille les Pensées et maximes de Balzac et tisse des liens d’amitié avec Baudelaire, dont il prendra le parti en 1857, en défendant Les Fleurs du Mal. Les deux années qui suivent, il se réconcilie avec son passé : il revient à la pratique religieuse en 1855, retourne en Normandie en 1856, où il n’était pas allé depuis vingt ans, et en profite pour renouer avec ses parents. Deux ans plus tard, sa mère meurt, et il rompt définitivement avec Trébutien.
En 1862, il publie dans Le Pays des articles contre Les Misérables de Victor Hugo et Sainte-Beuve l’évince, cette critique du roman social d’Hugo faisant scandale.
Quelque temps après, Barbey écrit de nombreux romans, publiés en feuilleton dans la presse comme Le Chevalier des Touches en 1864 et Un prêtre marié en 1865. L’année suivante, il établit le plan des Ricochets de conversation, qui prendra le titre définitif des Diaboliques. Cet ouvrage, devenu l’œuvre majeure de Barbey est publié en novembre 1874. Devant la menace d’un procès, il est retiré de la vente pour « atteinte à la morale publique ». Barbey assure aux juges que le but de son œuvre était de « moraliser ses semblables en leur donnant l’horreur du vice ». L’intervention de ses amis, Arsène Houssaye et Gambetta lui évitera le procès. Les exemplaires de l’ouvrage sont détruits avec le consentement de l’éditeur et de l’auteur, qui doit prendre l’engagement de ne pas le rééditer. Zola juge très sévèrement l’attitude de l’écrivain qui renonce à son œuvre par intimidation et lâcheté : « Il a tremblé et consenti à un marché indigne d’un écrivain. » En 1879, Barbey subit encore la censure religieuse, puisque la réédition d’Un prêtre marié est interdite à la vente par l’archevêché de Paris. La même année, Edmond de Goncourt inscrit Barbey sur la liste de l’Académie des Dix.
En 1882, la publication d’Une histoire sans nom et d’Une page d’histoire, ainsi que la réédition des Diaboliques, marquent la fin de son œuvre littéraire. Les dernières années, il rassemble ses articles de journaux dans Les Œuvres et les hommes, dont le onzième volume paraîtra l’année de sa mort. Malade, il s’éteint le 23 avril 1889. Nommé « le connétable des lettres » par ses admirateurs, il est inhumé au cimetière de Montparnasse. En 1926, sa dépouille est transférée à Saint-Sauveur-le-Vicomte.
Bibliographie des œuvres principales :
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